BENJAMIN LUNETTA - Directeur et professeur de chant

L'interview de Benjamin Lunetta

"Je suis un artiste qui enseigne et un enseignant qui chante"

Benjamin, pouvez-vous vous présenter ? 

Je suis Directeur de l’Ecole Ryméa, une école d’éducation musicale Willems® à Lyon. Je suis un artiste qui enseigne et un enseignant qui chante. 

Parlez-nous de votre éducation à la musique. Comment s’est développé votre amour de la musique ? 

J’ai commencé la musique à l’âge de 6 ans. J’ai une formation de violoniste et j’ai fait de la danse classique. J’ai hésité entre les deux disciplines. J’ai été élève au Conservatoire de Dijon puis à l’âge de 10 ans en classe à horaires aménagés au Conservatoire National de Région (CNR) à Lyon. J’ai obtenu un prix (médaille d’or) en formation musicale. J’ai par ailleurs découvert le chant tardivement.  J’ai intégré le chœur de Régine Théodoresco à 22 ans à Lyon puis la maitrise de Notre-Dame de Paris, dirigée à l’époque par Nicole Corti. « Avec Nicole, nous faisions de la pédagogie Willems® sans le savoir ». Nous chantions lors des offices de Notre-Dame de Paris, nous donnions aussi des concerts (la Passion selon Saint Jean, Passion selon Saint Matthieu de Bach…), nous avons travaillé avec de grands chefs internationaux et des artistes lyriques tels qu’Hans Peter Blochwitz ou la chanteuse tchèque Magdalena Kožená. C’était incroyable ! Puis Nicole m’a ensuite proposé d’enseigner. J’avais 29 ans. Le premier jour m’a donné mal au crâne puis la passion pour l’enseignement ne m’a plus jamais quitté ! J’enseignais notamment auprès du chœur préparatoire de la maitrise de Notre-Dame de Paris.

J’ai chanté dans plusieurs ensembles, notamment le Concert Spirituel fondé par le chef d’orchestre Hervé Niquet (ndlr : qui interprétera en 2024 la musique d’un couronnement à Westminster afin que le public puisse se faire une idée du choc ressenti par les auditeurs dans le Londres du XVIII e siècle). J’ai interprété beaucoup de musique française, britannique (Purcell), allemande (Bach dont la musique est un équilibre parfait entre le corps, le mental et l’affectif comme « La messe en si, chef d’œuvre absolu ! »). Wagner reste très important dans ma vie… Je suis donc venu naturellement à l’Opéra. 

Vous êtes chanteur professionnel, mais l’enseignement est aussi votre métier. Qu’est-ce que la transmission pour vous ? 

La transmission est pour moi fondamentale. C’est la nature de mon métier. Je souhaite que les jeunes musiciens puisent en eux, se livrent, trouvent leur expressivité. Le travail du corps reste premier, j’irai même plus loin le travail sur la présence du musicien dans l’écoute, le beau, le naturel, l’authenticité.

Il faut partir de l’enfant, l’accompagner ; qu’il devienne autonome : il ne s’agit pas de faire à sa place ! On sous-estime souvent cela des enfants. Moi, je sais qu’ils peuvent le faire ! C’est une collaboration d’artiste à artistes, de savoir-être à savoir-être. Et la pédagogie Willems® y aide beaucoup. 

Qu’apporte donc la pédagogie Willems® aux enfants par rapport à d’autres méthodes ? 

La méthode Willems® travaille sur une écoute profonde du son, elle permet d’affiner son oreille, d’être toujours connectée à la vibration et à son expressivité.

Les parents ont parfois peur lorsque c’est trop sérieux, que les enfants s’ennuient, que ça ne soit pas assez ludique. Mais l’écoute est propre à l’être humain : elle est même naturelle chez les plus jeunes. Être dans l’écoute crée de l’écoute. Je dirais que notre enseignement aide les enfants bien au-delà de la musique. Ça les aide dans leur vie, pour la vie en société, leur future vie d’adulte. 

Vous proposez plusieurs auditions dans l’année. C’est l’occasion pour les enfants de monter sur scène. Qu’est-ce que cela leur apporte ? 

Certes c’est une évaluation, mais c’est surtout l’occasion de se retrouver pour faire de la musique ensemble. 

Les auditions les aident à être spontanés, à dépasser la question de l’image – notamment vis-à-vis du regard des parents dans la salle. Ils font avec ce qu’ils sont, sans artifice. Je me mets en retrait pour que les enfants soient libres de s’exprimer. L’apport va bien au-delà de la musique ! Il n’est pas question de trac de toute façon puisque c’est la musique qui est au centre.

Cela fait bientôt trois ans que vous êtes directeur de l’école Ryméa, parlez-nous de votre équipe, des professeurs, de l’équipe administrative ? 

Je demande surtout de l’engagement, être dans une dynamique. L’essentiel est de faire progresser l’élève, lui donner confiance, l’aider à se déterminer.

Quels sont les projets de Ryméa en 2023-2024 ? 

Nous proposons des stages pour préparer les mini-opéras pendant certaines vacances scolaires. Ils ne sont pas obligatoires, mais font partie intégrante du projet pédagogique de l’école. Et le fait de passer plusieurs jours ensemble pour faire de la musique, soude le groupe et les fait encore progresser davantage ! 

Je souhaite également proposer de la musique de chambre dès la deuxième année d’instrument avec par exemple les quatre mains pour les pianistes, les trios et quatuors de violons ou de guitares… 

Ryméa propose aussi un chœur d’adultes mixte dirigé par Éloïse Magat qui est issue du Conservatoire National Supérieur de Musique de Lyon. Elle est accompagnée d’un pianiste une semaine sur deux. Nous recrutons des chanteurs pour cette nouvelle année scolaire avec une priorité pour les ténors et les basses.

Je rêve d’un projet intergénérationnel dont tous les instrumentistes auraient de la vocalité – un lien entre les enfants et les adultes cherchant ensemble un idéal musical par le dépassement de soi.